Où en sommes-nous 18 ans après la catastrophe qui, très tôt, a engendré le siècle?
Mauvaise pensée
11 septembre 2018 par Christophe Van Rossom
– En Occident, nulle part. L’Europe se désagrège à grande vitesse, sous nos yeux. La régression et l’immaturité constituent la signature de nos existences. La captivité au sein d’un éternel présent ne gêne plus personne. Toute connaissance du passé feue, nous errons sans le moindre esprit de perspective ; et c’est de cette faute que nous mourrons, car c’est d’elle que nous agonisons déjà.
À l’exception de quelques foyers de résistance au sein desquels il est encore possible de parler sa langue et de dire sa pensée sans tabou ni danger, le désert croît. La robotisation des esprits et des mentalités, prophétisée naguère par Pierre della Faille, est acquise.
Rois-mages d’un Antéchrist sans adversaire, la Lâcheté, la Vulgarité et Bêtise dominent partout. L’illettrisme est dorénavant tenu pour une qualité. Savoir ou être sont suspects. Il y a lieu de posséder. Malheur aux idiots qui n’entonnent pas cette antienne. L’on entend que nous restions consommateurs ou que nous devenions actionnaires, c’est tout. L’Oeil sans paupière nous observe jour et nuit, contrôle nos paroles, nos gestes, nos pensées. L’individualisme est omniprésent, mais, même armé d’une lanterne, il devient difficile de trouver un homme.
Je n’oublie pas les autres menaces. Je n’oublie pas celles qui profiteront des ruines de ce que nous fûmes et des forteresses que nous n’avons pas eu l’intelligence de construire. Je ne suis ni silencieux ni résigné. Écoutez plutôt la date que je murmure, à l’instar d’un mantra : « 1565, 1565… »
Fou vieux désormais, je continue de croire à de possibles contre-réseaux. À des affinités secrètes. À une compréhension qui se passe aisément des mots.
Quand je me sens contraint d’écrire, c’est que cela va mal.
Si j’en avais le courage ou la foi, j’écrirais continûment.
– Mais sans le moindre impact, en effet, merci de me le rappeler, cher collègue, cher critique, cher ami.
© Christophe Van Rossom, Armes & bagages, à paraître.
1565 ? 1565 ? Pardonnez mon ignorance, mais je ne vois pas à quoi correspond exactement cette date ? Je tiens à vous dire que je lis toujours avec attention vos textes. Merci.
Chère Madame, cher Monsieur,
1565 est une date qui intervient de manière implicite ou explicite dans mes textes çà et là.
Cependant qu’une partie non négligeable de l’Inde subit les assauts de l’Islam guerrier et y succombe, en Europe, et de la façon la plus improbable étant donné le rapport de force, Malte, alors sous la tutelle des Chevaliers Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem et de Rhodes tient en échec les Turcs pendant des mois, à l’occasion du plus grand siège naval de l’histoire. Ces derniers s’apprêtaient à ne faire qu’une bouchée de l’archipel minuscule avant d’attaquer la Sicile, alors espagnole, pour marquer ensuite des prétentions sur le sud de l’Italie. Je vous laisse en imaginer les conséquences. Les tours et détours de l’histoire sont quelquefois étonnants, sinon heureux.