Christophe Van Rossom s’entretiendra avec Philippe Brunet, aède et traducteur de L’Iliade.
« Chante, déesse, l’ire d’Achille Péléiade… »
Voici près de 3000 ans que ce vers ouvre à une aventure qui ne laisse pas de captiver les hommes depuis la fin de l’âge du bronze. Lorsque l’aède prononçait ces mots, un grand silence et une grande émotion envahissaient la place ou la salle. Ses auditeurs savaient que le poème était sur le point de leur dévoiler, au-delà des exploits des guerriers grecs et troyens, la façon dont la guerre révèle les hommes à eux-mêmes. L’Iliade, première parmi les épopées fondatrices, est un moment clé dans l’histoire de l’Humanité. Elle nous demeure encore aujourd’hui un miroir tendu de ce que nous sommes dans nos pires comme dans nos meilleurs moments. Elle rappelle que la guerre ne connaît pas de vainqueur – que des vaincus. La fin du texte est édifiante de ce point de vue, car elle ne raconte nullement le triomphe des Grecs sur l’éblouissante cité. Elle se contente de nous dire que devant les murs brûle la dépouille de Patrocle tandis qu’en leur sein un bûcher emporte vers le ciel le cadavre mutilé du prince Hector.
Et voilà pourquoi il est sans doute si important de revenir sans cesse à ces mots fondateurs, et voilà pourquoi il est capital que l’on retraduise, régulièrement, les poèmes homériques.
La façon dont Philippe Brunet a travaillé est, de ce point de vue, non moins minutieuse que passionnante. Professeur de grec ancien, spécialiste de la prosodie et de la musique de l’Antiquité, Brunet s’est en effet attaqué à L’Iliade non seulement en philologue scrupuleux mais aussi en aède lui-même. Il faut en effet savoir qu’à côté de ses tâches universitaires et de ses recherches, Brunet a fondé voici une quinzaine d’années, sous le nom de Démodocos, une compagnie destinée à défendre la beauté et les valeurs de la littérature grecque.
Depuis qu’il a commencé sa traduction de L’Iliade, Brunet l’interprète ainsi parallèlement, à l’instar des poètes itinérants de la Grèce ancienne, en s’aidant de son instrument, ainsi que les auditeurs des Midis de la Poésie ont pu s’en rendre compte en novembre dernier.
Bibliographie
– Sappho, Poèmes et fragments (édition bilingue), L’Age d’Homme, 1991
– La Batrachomyomachie d’Homère (texte établi par Yann Migoubert), précédée de Discours sur la Batrachomyomachie de Giacomo Leopardi, Paris, Allia, 1998
– Hésiode, La Théogonie, Les Travaux et les jours et autres poèmes, Livre de poche, 1999
– Sophocle, Antigone (édition bilingue), éditions du Relief, 2010
– Homère, L’Iliade, Éditions du Seuil, Paris, 2010.
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