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Posts Tagged ‘Casanova’

[En réponse à une autre question ouverte]

 

Il n’y a ni sujet, ni matière.

Une table, une chaise, une voix qui va. Cela suffit. Le tableau est un luxe. Soudain, le Social est mis entre parenthèses pour une circulation qui n’a rien de mécanique.

Le sommeil est merveilleux, mais l’éveil, lorsqu’il survient, et que les yeux répondent à toutes les sollicitations qui lui assaillent la rétine, est l’unique miracle proprement humain. Je songe à l’œil qui s’ouvre au début de chaque épisode de la série gnostique Lost.

Un homme se présente devant ses semblables. Leur âge n’importe pas. Il leur tend la main. Leur propose une transaction. S’ils acceptent, l’échange, la transmission, la conversation, le débat, la rencontre, deviennent possibles. La chose est assez rare pour qu’on la souligne. Où, sinon dans certaines classes, à de certains instants, est-elle encore imaginable? La joie d’apprendre peut alors rayonner, quoi qu’il se passe au-delà des fenêtres et de la porte de l’amphithéâtre. Pas de flics à La Sorbonne! Comprenons : aucune sorte de police, l’uniforme en serait-il séduisant. Le maître apprend autant que l’élève, car la parole qui se déploie simultanément pense, mieux, peut-être, qu’à tête froide, ainsi que le notait Kleist. Rien ne doit y être assujetti à une autre injonction que le plaisir de se retrouver , ensemble, pour que s’affûtent davantage les sens, le goût et l’esprit. Tous les ordres extérieurs sont priés de demeurer à l’extérieur. L’idéologie est la seule étudiante à qui je refuse l’accès à mes locaux. (suite…)

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Je ne connais ni le ressentiment ni la nostalgie. Il se trouve en revanche que ma mémoire est bonne. Ayant dilapidé mon héritage chrétien durant l’adolescence,  j’ai constaté que mes colères, souvent, se sont avérées justes conseillères et, de longtemps, Monte-Cristo est devenu mon maître en matière de stratégie.

Les Hwarang ouvrent nos vies à la beauté autant qu’à une sagesse  martiale. L’Art de la Guerre est un art poétique. Yves Bonnefoy écrit en 1953 : « Je t’appellerai guerre et prendrai sur toi les libertés de la guerre. »

Les airs composés par le Capitaine Tobias Hume rythment mes pas. Il advient qu’au seul nom de Jean Parisot de La Valette, l’émotion m’étreigne soudain la gorge. La silhouette de Michel de Montaigne à cheval, son épée au côté, se détache sur l’ombre des temps. L’épée de Casanova rendant justice au Chevalier de Seingalt insulté est une signature. Les poings d’Arthur Rimbaud ont eux aussi écrit des Poèmes.

Sun Tzu ne quitte jamais ma poche ou ma table de chevet. Il m’apprend à vivre en rendant coup pour coup au néant ennemi. À opposer à son haleine putride le souffle soulevant du Vide. À trancher la tête du courtisan qui prend le risque de ne pas comprendre. À frapper au cœur toute adversité imbécile.

Nos bouches, nos gestes, nos attitudes se ressemblent tellement aujourd’hui. Tout est toujours si prévisible.

Je n’appartiens qu’au cercle tracé par mon sabre sur le sable que déplacent les vents.

Armes & bagages, à paraître.

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Sur la poésie, aujourd’hui

Trialogue

 

Dans une lettre adressée à sa femme en 1779, Sade écrit : « Que veux-tu que l’on fasse sans livres ? Il faut être entouré de livres pour travailler, sinon on ne peut faire que des contes de fées, et je n’ai pas cet esprit-là. » Le poète non plus sans doute n’a guère cet esprit-là, pas davantage qu’il n’écrit la tête errant entre les nuages. Pas un poète, digne de ce nom, qui ne soit un remarquable lecteur. Quel rôle joue la Bibliothèque dans votre travail quotidien, dans l’élaboration de vos poèmes ?

 

Jean-Paul Michel – Rien comme un livre n’appelle un livre en réponse. La Bibliothèque, c’est « le corps certain », la jauge. Elle atteste la sédimentation, irrécusable, de tant d’« impossible », pourtant là, précisément actualisé. La Bibliothèque fait obligation à l’auteur de tenir devant l’éclat des Phares. Elle est l’incitamentum d’un grand nombre de mouvements d’écriture, appelés avec nécessité comme autant de « réponses » qu’il nous est expressément enjoint d’apporter à notre tour, notre moment, sur la longueur d’onde unique de retentissement de l’expérience qui peut vibrer dans une voix. N’était la Bibliothèque, la « niaiserie affairée », qui est, dit Kant, « le caractère de notre espèce », l’emporterait sans rencontrer bien grande résistance. (suite…)

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Vertiges, de W.G. Sebald, Actes Sud, Arles, 2001. Traduit de l’allemand par Patrick Charbonneau.

Vertiges est, à ce jour, le troisième livre de W.G. Sebald traduit en français. Paru initialement dans sa langue d’origine en 1990, il fait suite aux Emigrants[1], recueil de récits, à la fois émouvants par leur contenu et neufs dans leur facture, qui avait fait date à l’occasion de leur sortie en 1999, ainsi qu’aux Anneaux de Saturne, publié la même année, chez Actes Sud également. Bavarois, Sebald vit depuis de longues années en Angleterre, où il enseigne la littérature.

Point commun entre ces trois livres : l’usage d’illustrations, de photographies et de documents qui émaillent le texte. C’est que Sebald est un amoureux du fait avéré, ce qui le conduit du reste à multiplier les détails précis ou à avancer, preuve à l’appui, des dates, sinon des heures. L’effet de réel ainsi produit, est, avouons-le déconcertant de prime abord et reste perturbant au fil de la lecture. Passionné absolu du réel et des hasards incroyables que la vie sème sur nos routes, Sebald cherche avec fièvre comment traduire dans la langue la densité de certains instants vécus, aussi bien que la surprise qu’ils recèlent quelquefois. Car il s’agit bien, pour ce néo-proustien, de porter un regard sur la vie qui dise tout à la fois sa profondeur et son énigme, tout en tâchant de la dénouer autant que possible. Comment ? Eh bien, par exemple, en traquant ce qui autorise à mieux la cerner. C’est-à-dire des moments que bien souvent la « grande Histoire » ne retient pas, des anecdotes de prime abord peu significatives.

(suite…)

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« Il y a des gens qui disent que la vie n’est qu’un assemblage de malheurs (…). Je les tiens pour race de pessimistes, qui ne peuvent avoir existé qu’entre des philosophes gueux et des théologiens atrabilaires. Si le plaisir existe et qu’on ne puisse en jouir qu’étant en vie, la vie est un bonheur. »

Giacomo Casanova

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« Rien ne pourra faire que je ne me sois amusé. »

Giacomo Casanova

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Le monde est vicieux,

Tu dis ? Tu t’étonnes ?

Vis ! et laisse au feu

L’obscure infortune…

Arthur Rimbaud, Age d’Or

Au nom de qui ou de quoi devrais-je aimer ceux qui se mirent dans l’abîme?

Ceci est rien moins qu’une déclaration d’intention cynique.

Quelques cailloux suffisent pour fonder. (suite…)

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